Cette table ronde était constituée de six intervenants : M. Adrien Carbonnet, de l’Université de Louvain, Mme Raina Beneva, de l’Université de Sofia, Mme Bouriane Lee, ancienne attachée d’éducation de l’Ambassade de Corée et présidente de l’AFELACC, M. Rogie, principal du Collège Les Bruyères et Mme Sohee Kim, professeur de coréen dans la section Internationale de ce collège, et enfin Mme Françoise Audry-Iljic, Inspectrice générale de l’Education Nationale, remplaçant M. Benoît Gobin du Ministère de l’Education Nationale.
Mme Jiyoung Choi, de l’INALCO, a ouvert la table ronde en rappelant l’objectif, qui consistait à dresser un état des lieux de l’enseignement du coréen dans le secondaire en France – c’est-à-dire au collège et au lycée, et leur équivalent dans d’autres pays européens – ainsi qu’à en présenter les perspectives.
Pour commencer, nos collègues européens nous ont fait part de la situation de l’enseignement du coréen dans le secondaire en Belgique et en Bulgarie : Adrien Carbonnet, de l’Université de Louvain, nous a décrit une situation très différente de la France pour ce qui est de l’enseignement du coréen dans le secondaire. En effet, il semble inexistant en Belgique, aussi bien au collège qu’au lycée. En revanche, du côté des universités, la situation paraît meilleure, avec l’exemple des Universités de Louvain et de Gent qui proposent des cours de langues coréennes.
Ensuite, Mme Raina Beneva, de l’Université de Sofia, nous a fait part de ses observations concernant l’enseignement du coréen dans le secondaire en Bulgarie. On pouvait déjà y apprendre le coréen dans les années 90, mais ce n’est que récemment, depuis une dizaine d’années, que cet enseignement s’est développé. Le contexte est différent aujourd’hui, car si la Corée n’était pas encore très connue dans les années 90, elle l’est aujourd’hui davantage. Il est maintenant possible d’apprendre le coréen en LV3, et un lycée spécialisé en langue étrangère réputé propose même le coréen en LV1 depuis 2011, en offrant dix-huit heures de cours par semaine en première année ! Actuellement, des recherches sont en cours pour élaborer un programme de langue en collaboration avec la faculté de pédagogie. Une dynamique semble donc bien engagée.
Pour ce qui est de la situation en France, Mme Bouriane Lee, ancienne attachée à l’éducation de l’Ambassade de Corée et Présidente de l’Association Française des Enseignants de Langue et Culture Coréennes (AFELACC), a rappelé l’explosion de la demande pour apprendre la langue et la culture coréennes, que ce soit dans un cadre associatif, dans le supérieur ou dans le secondaire. Il y a dix ans, il n’y avait qu’une quinzaine de candidats au baccalauréat par exemple ; la situation est bien différente aujourd’hui.
Mme Lee nous a fait part des activités de son association, très dynamique dans le domaine de l’enseignement de la langue et de la culture coréennes. L’association intervient dans différents établissements, notamment dans le secondaire, et a conçu des « Ateliers coréens » qui proposent une approche didactique interdisciplinaire intéressante, par exemple un atelier de « danse des masques » mêlant art plastique, expression corporelle, écriture, etc. En termes d’enseignement des langues, sept manuels, dont quatre publiés, ont été écrits. Mme Lee a terminé son intervention en soulignant que le coréen est entré dans le système éducatif secondaire depuis fin 2016, et que les chantiers menés grâce à la passion et l’énergie des bénévoles devaient désormais se structurer. Mme Lee a également appelé à un rapprochement du secondaire et du supérieur pour de plus amples coopérations.
Ensuite, M. Rogie, principal du Collège Les Bruyères de Courbevoie et Mme Sohee Kim, enseignante de coréen dans la Section Internationale de ce collège, sont intervenus. Nous avons pu visionner une vidéo d’une dizaine de minutes, tournée dans la classe d’initiation au coréen du collège. Le film rendait bien compte de l’engagement de l’enseignante et de l’enthousiasme des élèves. Après le visionnage, M. Rogie a donné plus de précisions sur la Section Internationale de Coréen. En plus des enseignements classiques, on compte cinq heures d’enseignement de langue et de culture coréennes et deux heures d’enseignement des mathématiques en coréen, dispensés par deux enseignants, Mme Kim et M. Lee. Cette toute jeune Section Internationale coréenne du Collège Les Bruyères devrait désormais gagner en renommée et attirer également des élèves parisiens.
Enfin, Mme Françoise Audry-Iljic, Inspectrice générale de l’Éducation Nationale, a approfondi le sujet des Sections Internationales Coréennes. Mme Audry-Iljic a commencé par nous rappeler le principe et la philosophie générale des Sections Internationales. Dans ces sections, l’enseignement classique est dispensé en français. Les enseignements de coréen, ou en coréen, sont donc des enseignements supplémentaires qui nécessitent une grande motivation de la part des élèves. Deux Sections Internationales Coréennes ont été ouvertes l’année dernière : l’une à Courbevoie, dont un témoignage nous a été donné dans la précédente intervention, et l’autre à Strasbourg. Mme Audry-Iljic nous a commenté le choix original de la discipline non-linguistique enseignée en coréen, en l’occurrence les mathématiques. Se servir d’une langue à d’autres fins que l’apprentissage de celle-ci est certainement une bonne façon de l’assimiler : c’est précisément la philosophie qui sous-tend l’apprentissage d’une discipline non-linguistique en langue cible dans les Sections Internationales. Le choix s’est porté sur les mathématiques pour le coréen – plutôt que le choix classique de l’histoire-géographie – pour de multiples raisons : cette matière requiert moins de vocabulaire à acquérir et permet de progresser grâce à la recherche de la rigueur dans l’expression. Ce choix correspondait aussi à la volonté des partenaires coréens de sélectionner une matière scientifique.
En plus des deux Sections Internationales ouvertes à Courbevoie et à Strasbourg, d’autres sont susceptibles de s’ouvrir à l’avenir. Il serait également souhaitable de mieux faire connaître les Sections Internationales Coréennes déjà existantes, grâce à des partenaires comme le RESCOR. Enfin, Mme Audry-Iljic a également mis l’accent sur l’intérêt du développement conjoint des filières LV2 et LV3 en plus des Sections Internationales, afin de créer des ponts entre ces différentes filières. Mme l’Inspectrice générale a souligné l’appétit des élèves pour la culture coréenne : toutes les bases lui semblent donc être là pour un développement important de l’apprentissage du coréen en France. Dans la perspective de ce développement, les programmes et les ressources pour les Sections Internationales Coréennes feront l’objet d’un travail de conception courant 2019.
En conclusion, la dynamique de développement de l’enseignement du coréen au secondaire semble bien réelle, et s’inscrire dans un mouvement durable.