Atelier de traduction : 韓國痛史 結論

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結論

昔者 渤海大氏 有地五千里 享國三百年 武功旣爀 文物幷昌 天下稱爲海東盛國 及其滅也 所謂渤海史者 不見於後世 何哉 余嘗東到龍泉 欲訪古蹟 但見其蕙草蕭瑟 江水鳴咽 而高武文宣之宏勳偉業 悉已飄滅於無何有之鄕矣 夫文宣之際 渤海之文人學士 入唐登科第者 先後相望 而何其無文獻之略存也 又其王子王族及遺民 恥僕於遼 抱器入高麗者 萬餘人 豈其無一負鷄次之典而來者 且其民 爲馬韓同族 其土 爲高句麗舊疆 高麗人士 當視爲一家 何不訪而述之 故後人謂渤海史不修 知高麗之不振者 豈不信哉 蓋凡人類 宅此地球之上 脫野蠻生番之陋 而成國家制度 有道德倫理政敎法制之具者 莫不有史 史之所存 國魂所存也 試以亞洲最大且古之國 論之 中國之魂 托於文學 突厥之魂 托於宗敎 中國 間被匈奴鮮卑氐羌金源蒙古之劫 而五千年文學之淵源不絶 故不化於他族而竟能化他族而一之 突厥 國勢寢弱 土地日削 受制列强久矣 而一億萬敎徒之力 尙强 可冀其復振 此魂强之國也 如鮮卑契丹蒙古 方其盛也 能征服大地 威振天下 而武力一隳 國命忽焉 此魄强之國也 蓋國敎國學國語國文國史 魂之屬也 錢穀卒城池船艦器械 魄之屬也 而魂之爲物 不隨魄而生死 故曰國敎國史不亡 則其國不亡也 嗚呼 韓國魄已死矣 所謂魂者 存乎否乎 余以檀君開國紀元四千一百九十年 而生於黃海之濱 呱呱墜地之日 已負國民之責矣 而迄今老白首 荒廢厥職 使吾祖不祀 負此大罪 安所適歸 一日 訪吾同胞於靉陽而宿焉 翌朝 主人告余曰 夢有人問君在此 曰斯人有述乎 是其有東方文獻之責者 余聞而泫然曰吾祖 其默有命於小子耶 然本朝 右文爲治五百年 培養士林 恩深澤厚 文獻之述 當有其人 余非其材 何敢代斲乎 乃逡巡延竚 奄逾數年 而作者無聞 歲月如流 不我少延 余又廢此職也 則四千年文明舊國 亦將不類乎 渤海之國亡史亡耶 雖天下之人 誚我以蠻 亦烏得以辭耶 然四千年全部之史 有非孤陋衰鈍 所能爲役 且非可以時月告功 是則有望於能者 而自余生世以後 目擊之近史 庶可勉焉 乃自甲子迄於辛亥 爲三編一百十四章 名之曰痛史 不敢以正史居也 幸我同胞 認以爲國魂所存 而勿棄擲也否

Traduction(s)

Conclusion de l'Histoire douloureuse de la Corée

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結論

 

昔者 渤海大氏 有地五千里 享國三百年 武功旣爀 文物幷昌 天下稱爲海東盛國 及其滅也 所謂渤海史者 不見於後世 何哉 余嘗東到龍泉 欲訪古蹟 但見其蕙草蕭瑟 江水鳴咽 而高武文宣之宏勳偉業 悉已飄滅於無何有之鄕矣 夫文宣之際 渤海之文人學士 入唐登科第者 先後相望 而何其無文獻之略存也 又其王子王族及遺民 恥僕於遼 抱器入高麗者 萬餘人 豈其無一負鷄次之典而來者 且其民 爲馬韓同族 其土 爲高句麗舊疆 高麗人士 當視爲一家 何不訪而述之 故後人謂渤海史不修 知高麗之不振者 豈不信哉

 

 

 

 

 

 

 

 

 

蓋凡人類 宅此地球之上 脫野蠻生番之陋 而成國家制度 有道德倫理政敎法制之具者 莫不有史 史之所存 國魂所存也 試以亞洲最大且古之國 論之 中國之魂 托於文學 突厥之魂 托於宗敎 中國 間被匈奴鮮卑氐羌金源蒙古之劫 而五千年文學之淵源不絶 故不化於他族而竟能化他族而一之 突厥 國勢寢弱 土地日削 受制列强久矣 而一億萬敎徒之力 尙强 可冀其復振 此魂强之國也 如鮮卑契丹蒙古 方其盛也 能征服大地 威振天下 而武力一隳 國命忽焉 此魄强之國也

 

 

 

 

 

 

蓋國敎國學國語國文國史 魂之屬也 錢穀卒城池船艦器械 魄之屬也 而魂之爲物 不隨魄而生死 故曰國敎國史不亡 則其國不亡也

 

 

 

 

 

嗚呼 韓國魄已死矣 所謂魂者 存乎否乎 余以檀君開國紀元四千一百九十年 而生於黃海之濱 呱呱墜地之日 已負國民之責矣 而迄今老白首 荒廢厥職 使吾祖不祀 負此大罪 安所適歸 一日 訪吾同胞於靉陽而宿焉 翌朝 主人告余曰 夢有人問君在此 曰斯人有述乎 是其有東方文獻之責者 余聞而泫然曰吾祖 其默有命於小子耶 然本朝 右文爲治五百年 培養士林 恩深澤厚 文獻之述 當有其人

 

 

 

 

 

 

余非其材 何敢代斲乎 乃逡巡延竚 奄逾數年 而作者無聞 歲月如流 不我少延 余又廢此職也 則四千年文明舊國 亦將不類乎 渤海之國亡史亡耶 雖天下之人 誚我以蠻 亦烏得以辭耶 然四千年全部之史 有非孤陋衰鈍 所能爲役 且非可以時月告功 是則有望於能者 而自余生世以後 目擊之近史 庶可勉焉

 

 

 

 

乃自甲子迄於辛亥 爲三編一百十四章 名之曰痛史 不敢以正史居也 幸我同胞 認以爲國魂所存 而勿棄擲也否

Conclusion

 

Autrefois, le clan des Tae du Parhae posséda un territoire de 5000 li et jouit d’un État pendant trois siècles ; ses faits d’armes furent brillants, sa littérature et sa culture matérielle furent conjointement prospères, (au point que), dans l’Empire, le pays fut appelé : « le pays florissant de l’Est de la Mer », jusqu’à ce qu’il disparaisse ! Ce que l’on appelle l’histoire du Parhae ne fut pas visible au cours des générations postérieures. Pourquoi ? J’ai eu l’occasion de me rendre à l’Est jusqu’à Longquan, et j’ai cherché à en visiter les anciens vestiges : je n’ai vu que des orchidées, le vent désolé de l’automne, le cri noué des eaux du fleuve, mais l’œuvre éminente et le mérite grandiose des souverains Ko, Mu, Mun et Sŏn ont été complètement balayés par le vent dans « la contrée où il n’y a (plus) rien » ! Au temps des (rois) Mun et Sŏn, ceux, qui, parmi les académiciens du Parhae entrèrent chez les Tang et réussirent les concours mandarinaux, s’étaient succédés continuellement, aussi comment se fait-il qu’aucuns de leurs écrits n’aient subsisté ? De plus, ses princes, sa famille royale ainsi que le peuple resté fidèle à la dynastie, honteux d’être devenus les domestiques des Liao, entrèrent dans le Koryŏ, leurs vases dans les bras, au nombre de plus de dix mille. Comment se fait-il qu’aucun d’entre eux ne vînt, portant les écrits de Jici sur le dos ? En outre, son peuple était des mêmes clans que ceux du Mahan ; son sol, était dans les anciennes frontières du Koguryŏ. Les habitants et fonctionnaires du Koryŏ les considéraient avec justesse comme les membres d’une même famille. Comment ne pas les visiter et en témoigner ? C’est pourquoi, les gens des générations ultérieures dirent que le fait que l’Histoire du Parhae n’ait pas été écrite faisait comprendre que le Koryŏ n’avait pas brillé : comment ne pas le croire ?

 

L’humanité, qui habite sur cette Terre, a quitté la vulgarité de l’état sauvage et barbare pour établir états et institutions ; ceux qui ont été pleinement dotés des bienfaits de la Voie, de la morale, de la politique et de l’instruction, des lois et des codes n’ont pas pu ne pas avoir d’Histoire : là où existe l’Histoire, existe l’âme d’un pays. Afin de le vérifier en discutant du cas des plus grands et des plus anciens pays du continent asiatique, (je dirais que) l’âme de la Chine est contenue dans sa littérature ; l’âme des Turcs, dans sa religion ; la Chine a connu par intervalles la menace des Xiongnu, Xianbei, Diqiang, Jinyuan et Mongols, mais la source de sa littérature de cinq mille ans ne s’est pas tarie, c’est pourquoi, elle n’a pas été transformée par les autres peuples, mais jusqu’au bout, elle a pu transformer ceux-ci et les unifier. Pour ce qui est des Turcs, leur force nationale s’est affaiblie, leur territoire a été tronçonné jour après jour, et, longtemps, ils ont subi la contrainte de grandes puissances. Mais la force de centaines de milliers d’adeptes l’a maintenue puissante, si bien qu’elle peut espérer recouvrer sa prospérité : ceci est un pays dont le hon, l’âme spirituelle, est puissante. Quant aux Xianbei, Khitan et Mongols, parvenus à leur apogée, ils furent capables de conquérir un vaste territoire et d’imposer leur autorité dans l’Empire, mais quand leur puissance militaire chuta d’un cran, leur destin, en tant que pays, fut stoppé net. Ceci est le propre de pays dont le paek, l’âme matérielle, est puissante.

 

D’une manière générale, l’instruction, les sciences, la langue, les lettres, l’histoire d’un pays se rattachent à « l’âme spirituelle » ; (à l’opposé), la monnaie, les céréales, les troupes, les chars, les forteresses, les étangs, les navires et les machines se rattachent à « l’âme matérielle ». Les productions matérielles de l’âme spirituelle ne suivent pas l’âme matérielle, qui naît et meurt, c’est pourquoi on peut dire que la doctrine et l’histoire d’un pays ne meurent pas, si bien que le pays en question ne meurt pas non plus.

 

Hélas ! L’âme matérielle de la Corée est morte ! Quant à son « âme spirituelle » : on peut se demander si elle subsiste encore ou non. Je suis né sur les rives de la Mer Jaune l’an 4190 de l’ère de Tan’gun, fondateur du pays ; le jour de la déchéance nationale, au milieu des pleurs, j’ai endossé (ma part) de responsabilité. Moi-même, aujourd’hui, qui suis vieux et la tête blanchie, j’ai laissé cette charge à l’abandon, laissant nos ancêtres sans offrandes rituelles, et je porte ce grand crime. Vers quelle voie (devais-je) m’orienter ? Un jour, je visitai un compatriote à Aiyang et passai la nuit chez lui. Le lendemain matin, le maître de maison me dit : « j’ai rêvé qu’un homme me demandait si vous étiez ici, et je lui ai répondu : ‘cet homme a-t-il un témoignage à porter’ ? C’est la responsabilité induite par le fait qu’il existe des sources écrites dans la contrée de l’Est. » Je l’écoutai puis répondis en pleurs : « Nos ancêtres, n’auraient-ils pas, dans leur silence, donné un ordre à ma petite personne ? Cependant, notre dynastie avait fait de la prédominance des Lettres (sur les arts militaires) sa politique pendant cinq siècles, produisant des générations de lettrés, aux profonds bienfaits et à la vertu généreuse : la rédaction des documents (historiques) devrait revenir à de tels hommes.

 

Moi, qui n’ai pas leurs talents, comment oserais-je les remplacer dans cette tâche ? Si j’hésite à avancer et prolonge mon indécision, les années vont passer brusquement sans qu’un auteur ne se fasse entendre ; (or,) le temps est comme un courant, si ce n’est pas moi qui prolonge un tant soit peu (la tâche), j’aurais encore abandonné ce devoir ! N’en serait-il pas de même d’un vieux pays de quatre mille ans de civilisation ? Le pays du Parhae a disparu, son Histoire a disparu. Si les hommes de l’Empire me faisaient des reproches à cause de ma barbarie, comment parviendrais-je à les réfuter ? Toutefois, comment une histoire complète de quatre mille ans n’aurait-elle pas étroitesse de vue et faiblesse ? Ce à quoi je suis capable de m’employer n’est-il pas faire connaître les mérites du temps, c’est-à-dire donner de l’espoir aux hommes compétents, qui, à partir de l’époque où je suis né, seront témoins de l’histoire récente, et pourront - je l’espère - faire preuve de zèle dans l’action ?

 

Aussi, depuis l’année kap-cha (1864) jusqu’en l’année sin-hae (1911), j’ai réalisé trois sections de 114 chapitres appelés : t’ongsa « Histoire douloureuse », sans oser la considérer  au niveau du chŏngsa, l’histoire dynastique officielle. Puissent mes compatriotes admettre que l’âme spirituelle de notre pays existe bien et qu’il ne faut pas l’abandonner !

 
 

Autour du texte:

Academy of Korean studies Inalco Université Paris Diderot-Paris 7 EHESS