Dans le cadre de mon master 2 recherche, j’ai réalisé, durant l’année universitaire 2015-2016, un mémoire ayant pour titre « Un mouvement identitaire coréen par une musique mondialisée ? La construction du hip-hop coréen ». Le but de ce mémoire était d’étudier en quoi et par quels processus, une culture étrangère peut-elle servir de socle à l’expression d’une nouvelle coréanité, une certaine identité coréenne.
Cette recherche a débuté avec une simple observation de la communauté hip-hop, des comportements et des dires des auditeurs et des artistes lors des concerts tout au long de mes différents séjours en Corée du Sud. Me positionnant dans une approche microsociologique sur l’étude d’une culture, il était pour moi impensable de ne pas partir à la rencontre des différents sujets de mon mémoire.
Cette étude ayant été longuement réfléchie, son terrain a été réalisé en deux parties. La première lorsque j’étais en Corée du Sud à Séoul, en juin et juillet 2015, et la seconde, en France, lors du festival du MIDEM à Cannes, du 3 au 6 juin 2016.
Si ma première approche m’a permis de poser les bases de ma recherche, une observation directe n’était pas suffisante et j’avais clairement besoin d’autres supports pour aller plus loin dans ma réflexion. J’ai donc tout d’abord réalisé des analyses de paroles de chansons hip-hop coréennes et de biographies de rappeurs coréens. J’ai également conduis des interviews de plusieurs rappeurs coréens et un duo américain vivant en Corée du Sud, notamment par email.
La bourse du RESCOR, qui s’élevait à 1000 euros m’a donné la chance de pouvoir rencontrer directement les acteurs de la culture hip-hop et de dépasser la barrière qu’imposaient les interviews échangées par courrier électronique. Elle m’a permis d’assister à plusieurs représentations et séminaires, en particulier au festival du MIDEM (Marché International de l’Edition Musicale) qui se déroule chaque année à Cannes. Ne pouvant me déplacer en Corée du Sud l’année de la rédaction de mon mémoire, participer à ce festival qui propose un stand coréen et met à l’honneur des artistes issus de sous-cultures, était pour moi l’alternative idéale.
Loin d’être un simple festival de musique, le MIDEM est destiné aux professionnels de l’industrie musicale, et, par conséquent, les frais d’entrée sont très élevés. La bourse du RESCOR m’a donc permis non seulement de pouvoir participer au festival mais aussi de couvrir les frais annexes tels que le logement et les déplacements.
Ainsi, j’ai pu pendant quelques jours avoir un aperçu du fonctionnement de l’industrie musicale internationale et coréenne. J’ai tout d’abord assisté à des conférences, notamment une intitulée « Meet the Koreans » qui présentait les artistes coréens et faisait un point sur le marché musical en Corée du Sud. Par la suite, j’ai pu rencontrer différents acteurs de l’industrie musicale coréenne, soit la KOCCA (Korea Creative Content Agency), quatre groupes de chanteurs aux styles variés, leurs managers et leurs producteurs. Si discuter avec eux de façon informelle et comparer leurs points de vue sur la musique et son industrie fut très enrichissant, je me suis tout de même focalisée sur l’interview d’un groupe en particulier. En effet, le duo hip-hop « Eluphant » était venu, par chance, présenter son travail, et Kebee, l’un des deux membres, était l’un des rappeurs sur lesquels je me suis attardée dans mon étude.
Nous avons ainsi pu aborder plus en détail la relation qu’il entretient avec le hip-hop et l’évolution non seulement de cette musique mais de cette culture dans son pays. L’appropriation de l’objet culturel qu’est le hip-hop et sa transmission étant un axe important de mon mémoire, écouter le point de vue de Kebee, artiste qui a plus de dix ans d’expérience, m’a ouvert de nouvelles pistes et ainsi donner plus de profondeur à ma recherche.
Pour conclure, le fait d’avoir assisté au MIDEM a été très enrichissant et m’a grandement aidé à développer ma vision du hip-hop coréen et de sa place en Corée du Sud et à l’international. Il a été notamment très intéressant de constater que les quatre groupes invités pour représenter le marché musical sud-coréen faisaient partie de la scène indépendante coréenne et non pas des grandes maisons de production pop.
Ainsi, ce mémoire a mis en lumière les différents processus par lesquels le hip-hop est arrivé en Corée du Sud et a été modelé pour correspondre aux attentes et aux besoins de la société coréenne, en particulier des jeunes séoulites. Grâce aux interviews et aux discussions plus informelles avec différents acteurs du mouvement hip-hop coréen lors de mon étude de terrain, j’ai pu étudier l’évolution de cette culture. A travers les paroles des chansons, les biographies et les interviews, j’ai mis en lumière un thème récurrent : la légitimation du rôle de rappeur. En effet, un rappeur d’origine coréenne doit se positionner à la fois face à l’industrie musicale et au symbole fort que représente le hip-hop noir américain. C’est précisément cette légitimation qui est défiée lors des événements et rassemblements internationaux comme le MIDEM.

Boursière du RESCOR 2016
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