Ce texte reprend la conférence d’ouverture prononcée par Valérie Gelézeau le 5 juin 2014, lors du colloque « Aspects et tendances de la culture coréenne contemporaine » organisé par l’Université de Nantes. Ce texte est accessible en version intégrale sur HAL-SHS (halshs-01140555)
Comment dire « Corée » de manière neutre, sans se situer d’emblée au Sud (Han’guk, Pukhan) ou au Nord (Chosŏn, Namchosŏn) ? La langue elle-même dit la frontière, toujours en construction, qui divise la péninsule coréenne en deux États (la République de Corée Taehanmin’guk, et la République Populaire Démocratique de Corée Chosŏn minjujuŭi inmin konghwaguk).
Partant de cette constatation, et à partir de mes travaux sur la frontière, j’essaie de montrer dans ce texte que la partition est bien plus qu’un fait géopolitique survenu en 1945. En effet, la frontière spatiale est non seulement un processus toujours en construction, mais elle a suscité l’émergence de frontières sociales multiples et de territorialités nouvelles (Nord et Sud, péninsule et région asiatique, diaspora) redéfinissant profondément l’aire culturelle Corée. La division a surtout conditionné les perspectives d’approches des études sur la Corée : la pensée sur cet ensemble aujourd’hui difficile à définir, et qu’on ne peut pas désigner simplement en langue coréenne, est une pensée de la division – une schizo-coréanologie. Je conclus sur le fait que le moment est venu pour les études coréennes en France de dépasser une forme de schizo-coréanologie pour mieux rendre compte de ce qu’est « la Corée » pour les sciences sociales.
Source : Carnets du Centre Corée