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Festival d’automne à Paris édition 2015 : programmation Corée

 

Nous présentons cette année au Festival d’automne à Paris une programmation consacrée à la Corée.
10 dates se succèdent ainsi de septembre à novembre autour de la musique, de la danse et des traditions coréennes.

En voici un petit aperçu :

– un rituel chamanique menée par Kim Kum-hwa au Théâtre de la ville (20 septembre)
– une représentation de pansori par Anh Sook-sun aux Théâtre des Bouffes du Nord (21 septembre)
– et deux créatrices issues d’une nouvelle génération : Unsuk Chin, compositrice proche de Ligeti dont nous proposons un portrait en 5 concerts, d’octobre à novembre (Maison de la Radio et Philharmonie), et Euh-me Anh, chorégraphe qui présentera en septembre et octobre 3 pièces autour de 3 générations de Coréens.

Vous trouverez plus de détails sur cette programmation en cliquant sur le lien suivant :
http://www.festival-automne.com/programme/coree-quatre-artistes-entre-tradition-et-creation

 

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Née en 1931 dans le Hwanghaedo, aujourd’hui en Corée du Nord, et vivant désormais à Séoul, la chamane Kim Kum-hwa est nommée en 1984 « Trésor national vivant », pour avoir préservé plusieurs rituels, parmi lesquels celui, spectaculaire, de bénédiction des bateaux de pêche. Initiée dès l’âge de 17 ans – une maladie inexpliquée révèle qu’elle est « désignée » –, elle remporte en 1974 le Concours national d’art populaire. C’est un tournant dans l’histoire de la Corée, où le chamanisme n’est alors considéré ni comme un métier respectable ni comme un art légitime. Mais la spiritualité intense de Kim Kum-hwa, son charisme, ses talents de divination et la grâce fluide de ses mouvements manifestent une perfection rare.
S’il a foi en des forces naturelles et surnaturelles, le chamanisme coréen tient moins d’une religion que de l’organisation sociale, et se tourne davantage vers les hommes que vers les dieux. Son modèle s’est développé en marge du pouvoir des lettrés, qui en tolérait les expressions locales. Et sa capacité d’adaptation est saisissante, depuis quinze ou seize siècles : des sociétés de chasseurs et de pêcheurs, devant la nature immense, aux éleveurs et aux agriculteurs, soumis aux cycles de la vie animale et des saisons, et jusqu’à la société industrialisée des villes. À travers chants, instruments, danses, parures, décorations et objets rituels (autel, images peintes, offrandes, éventails, sonnailles ou fleurs de papier brûlées), la chamane ne récite pas une prière, ne fonde pas un ordre nouveau, mais répare des désordres.

Avec ses chamanes-assistantes et ses musiciens, Kim Kum-hwa présente au Théâtre de la Ville le rituel Mansudaetak-gut, où se succèdent une purification des lieux, les invocations des esprits de la lune et du soleil, ou des esprits protecteurs du village, un appel aux esprits des « mal morts » (morts sans descendance), le jeu du pilon pour une moisson abondante et le rite du hache-paille.

 

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Ceux qui ont assisté à une représentation de pansori n’oublient pas aisément son simple dispositif : un artiste – le plus souvent une femme –, vêtu traditionnellement, à la coréenne, arpentant une large natte qui lui sert de plateau, racontant une histoire ou la chantant d’une voix gutturale, mimant les expressions de ses personnages et dessinant, des mouvements de son éventail, ses paysages et ses horizons ; et un joueur de tambour, assis non loin, l’accompagnant, lui donnant le rythme et l’encourageant, par intervalles, de ses exclamations vocales.
Pansori : le mot, intraduisible, associe pan, en référence à la place des villages, et sori (bruit), désignant, de manière péjorative, la parole ou le chant de quelqu’un qui, dans la hiérarchie sociale, n’a pas droit au respect.
Le pansori naît au début du XVIIIe siècle, sinon à la fin du siècle précédent, dans les basses couches de la société – et dans la proximité des chamanes des provinces du Sud-Ouest. Cela explique sa truculence, ainsi que ses tons tour à tour moqueurs et sentimentaux. La Corée, peu avant cette époque, a connu deux invasions (japonaise en 1592, mandchoue en 1637), et sa classe dirigeante, des lettrés confucéens, conservateurs, s’efforce en vain d’éradiquer du petit peuple ses « superstitions ». Des douze pansoris répertoriés au milieu du XIXe siècle, cinq, recueillis ensuite, réécrits et embellis, se chantent encore et sont inscrits au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Unesco. L’un d’eux, Le Dit du palais sous les mers, met en scène des animaux. La satire sociale s’y laisse deviner : un Roi-Dragon, malade d’avoir trop bu et, pour guérir, est prêt à imposer à ses subordonnés n’importe quel sacrifice ; une Tortue, fonctionnaire loyal et dévoué ; un Lapin, qui ne survit qu’à travers les failles du système.
De ce pansori, Ahn Sook-sun, née à Namwon, dans la province du Jeolla du Nord, formée auprès des plus grands maîtres, et considérée comme l’une des interprètes exceptionnelles du genre, donne ici une version rare, à deux chanteurs (ipchechang), tantôt solistes, tantôt en duo, renforçant l’intensité du chant et la dimension ludique du récit ; ils sont accompagnés par le gosu, joueur de soribuk, tambour barrique réservé au pansori.

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Academy of Korean studies Inalco Université Paris Diderot-Paris 7 EHESS